04 La volonté et l’effort

Les connaissances et les sens

02 Avez-vous un but ?
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À L’ÉTUDIANT :

Vous avez déjà commencé à cultiver vos sens : cette leçon vous indiquera les moyens de continuer leur éducation.

Les données des sens doivent être élaborées, interprétées et assimilées par l’esprit.

Cultivez vos sens pour cultiver votre esprit.

Prenez la résolution de voir et de comprendre les choses par vous-même. Ne vous en rapportez pas aux autres ; ne comptez que sur vous. Le progrès n’est possible, qu’à ce prix. C’est ainsi qu’on acquiert la certitude, la confiance en soi, qui réagissent les autres.

Seuls réussissent, dans les affaires, en politique, en littérature, dans les sciences, les arts, ceux qui observent et comprennent.

LEÇON III

I. Cultivez vos sens

Connaissance et les sens.

1. Qu’entendons-nous par le mot connaissance ? on appelle ainsi toute information qui est due aux sens ou à la réflexion. Dans cette leçon, nous ne nous occuperons que de la connaissance qui provient de l’usage des sens ; dès maintenant, il faut que le lecteur sache, que l’étendue de ses connaissances est proportionnelle au champ et à l’intensité d’activité de ses sens.

S’il a, par exemple, la vue imparfaite, l’ouïe paresseuse, il ne connaîtra qu’une partie seulement de la vie ; il passera, sans les voir ou les entendre, à côté de mille choses qui devraient l’intéresser et éveiller sa pensée. On doit donc assurer à tous les organes des sens un bon fonctionnement afin d’avoir avec le monde extérieur un contact continuel aussi parfait que possible.

Mais, enregistrer ne suffit pas. Il faut réagir. il faut répondre. si vous demeurez passif en face des choses, non seulement vous ne pouvez pas les utiliser, mais vous ne les comprenez pas.

Or, il faut comprendre tout ce que l’on ressent, sinon la vie n’est qu’un simple catalogue de faits sans signification. La réponse aux sensations, comme nous venons de la définir, est la condition d’une vie mentale complète et utile.

L’idéal du pelmaniste doit être de répondre toujours aux appels et aux excitations du monde extérieur en les contrôlant par l’intelligence, de sorte qu’en voyageant, par exemple, il enrichisse continuellement son stock de sensations et d’idées. Même le travail professionnel devient matière à enseignement perpétuel.

La réponse à la vie.

2. Le ballon bondit sous un coup de pied ; l’image de cire fond devant le feu. Sous l’action de la chaleur ou du froid, les métaux se dilatent ou se contractent, les liquides se vaporisent ou se congèlent. C’est ainsi que les corps inanimés répondent à l’action de ce qui les entoure : le plus faible cède au plus fort inévitablement.

Mais vous n’êtes pas, vous, un corps inanimé. Vous vivez, vous sentez, vous pensez.

Vous pouvez vous refuser à subir passivement les actions qui s’exercent du dehors.

Vous pouvez vaincre des choses et des animaux plus forts que vous.

Averti par vos sens, vous pouvez éviter les dangers qui menacent votre vie. Votre réponse est vivante.

Or, vous n’êtes pas seul ; vous êtes plongé dans le milieu social, vivant lui aussi, que vous devez connaître pour vous y adapter. Vous y avez un rôle à jouer.

Puisque vous êtes pelmaniste, vous ne vous résignez pas au rôle du boudeur ou du timide qui refusent de se mêler à la vie, ni à celui de l’étourdi qui se laisse emporter par tous les tourbillons. Dans l’activité sociale, vous voulez une place, votre place personnelle, celle à laquelle, vous donneront droit vos aptitudes, vos connaissances et votre travail.

C’est en premier lieu par la vie des sens que vous êtes en contact avec votre milieu social, par la vue et par la parole. Étudiez avec soin les réactions de vous-même sur votre milieu, comme de votre milieu sur vous-même. Ayez « des yeux pour voir, des oreilles pour entendre ».

Comment se fait-il pourtant, alors que tous sont d’accord pour affirmer qu’il importe de connaître les hommes et les choses, que si peu se donnent la peine d’observer ?

Les uns, c’est par orgueil, les autres par humilité. Les premiers croient tout savoir, les autres s’imaginent que leur observation n’aurait aucune valeur.

Gardez-vous de ces deux excès ; considérez que le mieux informé a encore beaucoup à apprendre, et que le plus humble peut distinguer ce qui a échappé aux plus habiles.

Vous connaissez assez l’histoire de la machine à vapeur pour savoir que c’est un enfant qui a découvert un important perfectionnement auquel les plus savants ingénieurs n’avaient pas encore pensé.

L’accoutumance fait, il est vrai, qu’on ne perçoit plus les caractéristiques du milieu où l’on vit. Les étrangers s’émerveillent des beautés d’une ville que les habitants n’ont jamais regardées. Réveillez donc votre esprit, rafraîchissez vos sensations, renouvelez vos points de vue, regardez les lieux où vous passez tous les jours comme si vous veniez d’y arriver.

Étonnez-vous.

Les préjugés, à leur tour, bouchent les yeux et les oreilles et endorment l’esprit.

Pendant des siècles, on a enseigné qu’en se congelant, l’eau diminuait de volume.

L’observation du phénomène était pourtant facile, mais on ne pensait pas à se demander pourquoi les récipients remplis d’eau éclataient au moment du gel.

Ne vous laissez pas arrêter par ces obstacles, ces habitudes, ces préjugés.

Soyez pelmaniste : tenez toujours votre esprit en éveil.

Il ne suffit pas que vos sens soient attentifs, il faut qu’ils soient avides. Il faut qu’à tout ce qui vous entoure, ils posent d’incessantes questions.

Savoir observer, c’est savoir interroger les choses aussi bien que les hommes.

N’attendez pas nonchalamment que les impressions du dehors viennent à vous, faites-leur la chasse ; regardez, écoutez, épiez, tâtez, humez, flairez. Allez au-devant des connaissances par des hypothèses.

Autrement dit, gardez à n’importe quel âge et n’importe quelle condition, cette curiosité intelligente qui permet à l’enfant de connaître peu à peu le monde où il se trouve jeté presque sans défense.

N’imaginez pas que vous savez déjà, que les autres ont tout dit avant vous ; mais regardez l’univers comme si vous étiez un être différent des autres, et pour qui des milliers de choses sont vraiment neuves. Tout doit être pour vous, non seulement un sujet d’étude, mais un sujet d’émerveillement.

Sensation et perception.

3. Une partie importante de nos connaissances, avons-nous dit, s’acquiert par le moyen des sens. Comment les réalités extérieures — le soleil, la terre, les plantes, les autres hommes deviennent en nous des images, des idées, puis des connaissances, nul ne le sait.

Résignons-nous, comme tout le monde, à l’ignorer. Contentons-nous de constater que le monde nous est connu par la sensation et par la perception, selon un mécanisme dont voici la marche. L’ impression est l’information directe que nous fournit l’action des choses extérieures sur nos sens ; la fumée d’un cigare, par exemple, ébranle les ramifications du nerf olfactif. Cet ébranlement est transmis au cerveau. Il se produit ensuite dans la conscience une sensation : vous sentez une odeur. La marche en deux étapes est la même pour les autres, sens : d’où les sensations de la vue, de l’ouïe, de l’odorat, du goût et du toucher.

Puis vient la troisième étape notre esprit se borne pas à enregistrer passivement l’impression que la fumée du cigare a produite sur notre odorat. Il confronte la sensation qui en résulte avec le souvenir de sensations précédentes, la relie aux données des autres sens, et arrive ainsi à discerner la nature de ce qui a frappé le nerf olfactif.

« C’est, pense-t-il, la fumée d’un cigare. » cela suppose une comparaison

1° avec les souvenirs d’autres odeurs semblables ou différentes, de la fumée des cigares, des cigarettes, des pipes, des foyers, etc., antérieurement senties.
2 ° avec les données des autres sens, surtout visuelles, solidaires de ces souvenirs olfactifs : ainsi la fumée grise d’une cigarette, la fumée noire du charbon, etc. La sensation a été interprétée par l’esprit au moyen des connaissances antérieurement acquises.

On dit alors qu’il y a perception d’un objet. Par cette opération, l’esprit, au lieu de se borner à recevoir passivement les impressions que les objets extérieurs produisent sur nos sens, les compare à des souvenirs et définit de la sorte les propriétés des choses.

Contrôlez vos perceptions.

4. La perception n’est pas toujours complète et précise ; elle peut être vague et fugace.

Une horloge, par exemple, sonne auprès de vous ; le son frappe votre oreille, mais, étant mal éveillé ou distrait, vous n’en recueillez qu’une perception confuse et vous ne comptez pas les coups.

Si, cependant, aussitôt après, vous vous demandez quelle heure il est, vous pouvez arriver à le déterminer en évoquant vos sensations passées, par une intervention de la volonté ; la réponse est en vous, à votre insu. La totalisation des coups n’a pas été faite, mais les coups ont été perçus et enregistrés par votre mémoire. Si vous ne tardez pas trop, vous pouvez réveiller vos sensations successives et compter les sons qui vous semblaient évanouis.

Vous pouvez donc vous comparer à une plaque photographique où s’enregistre les impressions reçues par vos organes et que votre esprit développe. La sensation brute n’est qu’une plaque impressionnée ; la perception est une photographie fixée.

La perception suit normalement la sensation avec une rapidité qui échappe à toute mesure. Mais il arrive aussi que, fatigué, blasé, nonchalant, l’esprit, mauvais photographe, élabore lentement la sensation ou l’élabore mal et n’en tire qu’une perception vague sinon même fausse.

Les perceptions vagues produisent la dispersion de l’esprit et l’affaiblissement de la mémoire.

Les perceptions fausses produisent les illusions, qui peuvent avoir de graves conséquences.

Évitez-les en suivant les conseils pratiques que nous vous donnons plus loin.

Dès maintenant, sachez que vous ne devez pas être l’esclave de vos sens ni de vos sensations ; vous devez les contrôler par la conscience, les trier, et ne choisir, pour en faire usage, que celles d’entre elles qui servent à votre but immédiat ou lointain.

Ainsi un automobiliste, dans une rue encombrée, perçoit involontairement des milliers de sensations de tout ordre, mais pour son ouïe, sa vue, son tact, seules doivent compter celles qui lui permettent de conduire sa voiture sans accident ; toutes les autres, il doit les éliminer du champ de son activité.

De même, un peintre éliminera les bruits afin de fixer toute son attention sur les lignes, les formes, les couleurs.

Bien mieux, quand il s’agit d’un travail purement intellectuel, comme écrire un article difficile ou un livre, on peut arriver à diminuer considérablement l’action que le monde extérieur a sur l’esprit par l’intermédiaire des sens.

Plus on est absorbé par son travail, moins on a conscience des impressions éprouvées par les sens. Bien mieux, un bruit continu et monotone n’est plus perçu au bout de quelque temps : ronflement sourd des voitures dans une ville, bruit des vagues sur une plage, tic-tac d’une pendule ou d’un moulin.

L’esprit, de lui-même, élimine de la conscience ces bruits sans utilité directe. Quand ces bruits cessent, la conscience intervient : on « entend le silence ».

Dans la vie courante, beaucoup de perceptions qui n’ont pas, au moins sur le moment, un intérêt direct, sont ainsi éliminées de la conscience par rejet automatique dans le domaine du subconscient dont nous vous apprendrons l’importance et l’utilisation dans la leçon XI.

Mais que cela ne vous empêche pas de rechercher les stimulants comme la musique, qui développe l’ouïe, la peinture qui développe la vue, la poésie qui développe l’imagination. Toute augmentation de l’acuité de vos sens accroît en même temps la connaissance. L’éducation des sens et celle de l’esprit doivent se faire ensemble et d’un même mouvement.

Les sensations et le sentiment.

5. Si, jusqu’ici, votre curiosité s’est arrêtée à la surface des choses, que cette leçon sonne pour vous le réveil !

Si les événements vous laissent une impression confuse, faites que cette impression soit plus vive, plus nette.

Augmentez, stimulez votre désir de comprendre, aiguisez votre sensibilité, au risque de multiplier pour vous les occasions de souffrir. Il ne faut ni aimer, ni rechercher la douleur ; il faut l’utiliser à l’occasion.

Les bosses au front, les brûlures aux doigts sont pour l’enfant de bonnes leçons. Ceux qui ont souffert physiquement et moralement savent bien des choses qu’ignore toujours l’homme insensible.

Ceux qui se sont laissé emporter par le souffle puissant d’une idée connaissent des vérités qui ne luiront jamais dans une existence d’inertie et de routine. Mais en cultivant votre sensibilité, n’oubliez pas de la discipliner.

Du dehors vous viennent des impressions qui ne restent pas purement physiques : un coucher de soleil, un lac que moire le clair de lune, la brume dans la vallée influent sur l’état de votre âme.

Un mot imprudent de vos parents ou de vos maîtres a risqué, de vous décourager ; un mauvais exemple, de vous égarer ; une seule parole tombée des lèvres d’un homme sage peut vous rendre courage et vous remettre sur la bonne voie.

La lecture que vous faites en ce moment, si vous l’approfondissez, modifiera votre vie et peut-être est-ce seulement dans plusieurs années que vous vous en rendrez compte.

Vous n’êtes pas aujourd’hui ce que vous étiez hier ; vous ne serez pas demain ce que vous êtes aujourd’hui. D’une heure à l’autre, vous vous modifiez.

Que ce soit toujours pour vous développer. Entre toutes les impressions qui s’offrent à vous, choisissez celles qui peuvent vous y aider.

Pour bien choisir, comprenez.

La hiérarchie des sens.

6. Certes, tous vos sens servent au développement de votre esprit, mais inégalement.

Ainsi, le goût et l’odorat n’ont qu’un champ limité et tendent parfois à se confondre ; peut-être vous est-il arrivé de dire : “ces bonbons ont un goût de violette.”

De plus, ces deux sens manquent de fixité : le vin n’a pas le même goût selon qu’on vient de manger une noix ou une orange ; l’impression produite par un parfum est, elle aussi, très variable. Il convient cependant de développer le goût et l’odorat.

Le développement du tact est d’une utilité plus grande. Il vous fait découvrir l’état des corps (solides ou liquides, chauds ou froids), leur poids, leurs dimensions, et il est, par là, l’aide de la vue. l’épiderme est l’organe général du tact.

La main en est, grâce à sa riche innervation et à sa souplesse, l’organe spécial par excellence.

Du point de vue pelmaniste, il importe de développer à la fois le tact épidermique, par une bonne hygiène corporelle, et l’adresse des mains.

Nous vous rappelons que le système pelman n’admet pas la distinction vulgaire entre “intellectuels” et “manuels”, mais exige un développement complet de l’étudiant.

Soyez adroit de votre cerveau, c’est-à-dire sachez penser ; mais soyez tout aussi adroit de vos mains, dont l’activité est, elle aussi, à quelque degré, mentale.

Enfin, la vue et l’ouïe sont les facteurs par excellence de la connaissance ; par la peinture et la musique, elles nous introduisent dans le domaine de l’art.

La culture des sens.

7. Jusqu’à un certain point, tous les sens devraient être cultivés ensemble.

Si, après avoir fait une promenade, vous essayez de vous rappeler tout ce qui a frappé vos sens, vous évoquez des scènes, des sons, des odeurs et des images mentales du toucher.

Cependant, au point de vue pratique, il vaut mieux éduquer les sens séparément ; et la méthode qui assure cette éducation individuelle est un point important lorsqu’on pose les fondations de la culture mentale. Il arrive qu’un sens ne puisse pas se développer normalement : dans ce cas, ce sont les autres sens qui deviennent d’autant plus sensibles.

Laura Bridgman, la sourde-muette aveugle, avait le toucher assez fin pour reconnaître à une année d’intervalle la main d’une personne qui ne lui avait donné qu’un seul shake-hand.

L’on dit même que Julia Brace, sa sœur en infortune, avait l’odorat assez développé pour faire le tri du linge revenant de la lessive, en reconnaissant d’après l’odeur celui de chacun des très nombreux habitants de l’asile d’Hartford.

De même, dans la vie courante, un sens peut en suppléer un autre ; mais en règle générale, les sens s’entraident : si, après avoir soigneusement examiné une pièce de monnaie suspecte, vous jugez que, selon toute apparence, elle est bonne, vous en appelez au sens de l’ouïe : vous faites sonner la pièce sur la table pour en comparer le son avec le souvenir du son d’une pièce véritable.

Mais ce fait. Ne prouve point qu’il faille cultiver au même degré tous les sens à la fois.

On ne le prouve pas davantage lorsqu’on palpe une pièce de drap pour savoir si elle est pure laine.

Se servir simultanément de ses sens est une des précautions nécessaires pour obtenir une connaissance précise ; plus les sens sont développés, et mieux ils vous guident. Ce développement peut s’acquérir par l’éducation individuelle des sens.

La formule peut s’énoncer ainsi : « cultivez-les séparément ; servez-vous-en solidairement. »

Il nous faut enfin répondre à une objection possible : nos sens sont, en somme, très imparfaits et risquent souvent de nous suggérer des idées fausses ou des illusions.

Ceci est vrai : mais le but du pelmanisme est de mettre l’étudiant à l’abri des risques d’erreur en lui apprenant à observer d’une manière concrète et à rectifier les données de ses sens par la critique et le raisonnement.

De plus, ne vous faites pas un monstre de l’illusion.

Quelquefois, elle est inoffensive, parce qu’elle est commune à tous les hommes et que l’expérience ne tarde pas à la dénoncer. Elle peut même être profitable quand elle oblige à poser une question à laquelle la science doit chercher une réponse.

Enfant, vous vous êtes inquiété lorsqu’un bâton bien droit partiellement plongé dans l’eau vous est apparu brisé. Vous vous êtes rassuré en apprenant que votre père ne le voyait pas autrement que vous et, plus tard, vous avez écouté vos maîtres avec plus d’attention quand ils vous ont expliqué le phénomène de la réfraction qui est dû à ce que le rayon lumineux ne se propage pas de la même manière dans l’eau et dans l’air.

Voilà une illusion inoffensive. Mettez, pourtant, que certaines illusions aient été cause pour vous de difficultés ou d’échecs : en bon pelmaniste, analysez-les et tirez-en un enseignement. voici d’ailleurs des règles qui vous permettront de vous servir de vos sens sans péril.

II. L’utilisation des perceptions et des sensations

Le dressage de l’attention.

1. Nous vous avons conseillé de développer les organes des sens : encore faut-il y appliquer une certaine méthode et non pas se livrer au hasard. Le plus souvent, nos sens se contentent d’enregistrer les diverses sensations de la vue, de l’ouïe, du tact, sans que notre conscience intervienne activement ; elles constituent ainsi un trésor dans lequel nous pouvons puiser grâce à la mémoire.

Tout autre est l’activité consciente nommée observation : c’est un acte volontaire par lequel chacun de nos sens ou plusieurs d’entre eux font attention aux phénomènes extérieurs correspondants ; bien observer, c’est se donner des perceptions et des sensations aussi vigoureuses, aussi nettes et aussi complètes que possible.

Sous l’influence de l’attention, l’observation peut être :

A) quantitative (on observe peu ou beaucoup) ;

B) qualitative (les choses observées sont, ou non, importantes, originales) ;

C) passive ou active (selon qu’elle enregistre tout ou fait un choix) ; l’habitude tend à rendre passive l’observation qui était d’abord active.

Grâce à l’attention, nous faisons un choix parmi les impressions et les sensations ; la valeur de l’observation dépend de la valeur de ce choix, qui ne peut être bon que si nous possédons à la fois des sens aiguisés, un esprit critique bien développé et des connaissances précises dans un certain nombre de domaines.

Utilisez les préperceptions

2. Nous n’avons parlé jusqu’ici que des impressions qui frappent nos sens de l’extérieur et qui, par l’intermédiaire de la conscience, deviennent des perceptions.

Mais notre attention s’exerce aussi dans le monde intérieur qui comprend la mémoire, l’imagination, la réflexion.

Toute perception, on l’a vu dans le chapitre précédent, exige des sensations et des images puisées dans les stocks de la mémoire pour observer, il faut faire appel à ce trésor ; les perceptions emmagasinées antérieurement et qu’on évoque par l’attention sont dites pré-perceptions.

Voici une illustration, par le psychologue américain William James, de ce mécanisme intéressant :

Souligne les aspects originaux, les effets à admirer, pour faciliter à notre nature esthétique son plein épanouissement et la garder des émotions à contretemps maladroits.

Un des exercices pratiqués dans les « kindergarten » (jardin d’enfants)  consiste à faire compter aux enfants le plus grand nombre possible de détails dans un objet donné, fleur ou oiseau empaillé. Les enfants nomment de suite ce qu’ils connaissent déjà : les feuilles de la fleur, la queue, le bec et les pattes de l’oiseau.

Mais ils regarderont des heures entières avant de distinguer les narines, les ongles, etc., jusqu’à ce qu’on les signale à leur attention ; dès lors, ils ne manqueront pas dans la suite de les voir à chaque reprise de l’exercice.

Bref, nous ne percevons d’ordinaire que ce que nous pré-percevons.

Donc, pour que l’attention se porte sur un objet et le perçoive intégralement, il ne suffit pas qu’il soit présent aux sens, il faut encore qu’il soit présent à l’imagination.

L’image doit venir au secours de la sensation pour lui donner plus de relief, et ceci avec d’autant plus de nécessité que la perception aura été plus faible.

Renforcez vos perceptions.

3. Donc, dit encore James, « le meilleur moyen, de ne pas manquer une perception faible est d’aiguiser et de préparer l’attention en se donnant préalablement la même impression, mais plus nette. »

C’est le cas de la jeune fille qui attend avec impatience son bien-aimé,  un petit coup à la fenêtre,  imperceptible pour l’oreille la plus fine, sera distingué par celle qui concentre tonte son attention sur l’image auditive de ce signe convenu d’avance.

Le pouvoir de renforcer des perceptions faibles est d’une grande utilité pratique

1- quand il s’agit des perceptions très rapides ;

2 – quand il s’agit de plusieurs perceptions simultanées : par exemple, retrouver quelqu’un dans une foule, un objet parmi d’autres, distinguer une voix que l’on connait dans le bruit d’une salle, suivre une ligne mélodique dans la polyphonie d’une symphonie ;

3 – quand il s’agit de personnes myopes. Sans nous étendre ici sur ce sujet qui appartient aux spécialistes, remarquons seulement qu’une personne myope peut trouver un soulagement sensible en renforçant par des images, certains détails qui lui sont familiers.

Autre chose : nous savons tous que la netteté avec laquelle on voit un objet dépend en grande partie du fond sur lequel il se trouve (on verra par exemple beaucoup mieux un objet foncé sur fond clair que sur fond foncé).

On peut ainsi augmenter la netteté de la perception en renforçant mentalement la couleur du fond : on verra beaucoup mieux des lettres noires situées à une certaine distance si on s’imagine fortement la couleur blanche ou, ce qui est encore plus facile, des objets blancs qui nous sont familiers (le lait, le papier, la neige), ou qui ont pour nous une valeur affective par exemple la ouate pour un chirurgien).

La réussite dépend beaucoup de l’entraînement auquel vous savez soumettre votre « imagerie ».

Les avantages de l’observation.

4. Nombreux sont ceux qui passent à côté des personnes et des choses sans les voir réellement ; nombreux sont aussi ceux à qui les faits mêmes les plus simples ne « disent » rien. C’est contre ce défaut général que le pelmanisme veut réagir, puisqu’il veut créer des hommes d’action.

Or, comment agir quand on voit mal et qu’on entend mal ? pour ceux, au contraire, qui savent tenir leurs sens en éveil, qui s’intéressent à mille choses, qui, sans cesse, observent, enregistrent et évaluent, l’action devient aisée et les échecs mêmes sont un enseignement. L’observation les arme pour la vie.

Grâce à elle, ils discernent entre les choses des rapports multiples, des ressemblances, des différences qui, jusque-là, leur demeuraient cachées. C’est souvent une observation insuffisante qui est la cause de nos erreurs de jugement.

Que de gens sont incapables de distinguer un chinois d’un autre ! or, il y a autant de différences entre les diverses races chinoises qu’entre les diverses races blanches ; ces différences se manifestent chez eux, comme chez nous, dans les détails.

Trop souvent, on raisonne de même dans la vie courante, on ne juge des choses — ou même des êtres vivants — qu’en bloc, alors qu’une observation plus attentive et plus soutenue aurait permis un classement et une appréciation plus conformes aux réalités scientifiques ; or, quoi de plus important autant au point de vue pratique qu’au point de vue théorique pur, que d’avoir surtout des idées justes ?

Si tant d’intellectuels manquent de sens pratique, c’est qu’ils négligent de prendre contact avec la réalité par l’observation directe. Ils se servent trop uniquement de ce qu’ils ont lu.

En outre, ne pas observer est l’une des causes les plus directes de l’ennui. Comment la vie serait-elle intéressante pour ceux qui n’ont que des perceptions monotones, pour qui tout est sur le même plan ? Rien ne peut les toucher ni les émouvoir.

Qu’ils acquièrent l’habitude de l’observation : aussitôt les manifestations de la vie se nuancent à l’infini, ce monde qui leur semblait uniforme et vide se peuple merveilleusement, ils vibrent à l’unisson des autres et non seulement cessent d’être des spectateurs désabusés, mais s’élèvent au rang des créateurs d’émotions et de connaissances.

Son importance scientifique.

5. Quand cette curiosité vise à déterminer comment toutes choses se produisent, selon leurs causes ou leurs lois, elle détermine l’esprit d’observation scientifique, qui préside à l’élaboration des sciences physico-chimiques et naturelles.

Le célèbre entomologiste Fabre, pour connaître exactement et à fond les mœurs des insectes provençaux, pratiqua sans trêve, durant une longue vie, des observations systématiques.

La plupart des découvertes procèdent d’une observation originale et persévérante.

C’est souvent une remarque extrêmement simple qui, pour un esprit préoccupé de certains problèmes, est chargée de sens.

Vous connaissez l’histoire de la pomme de newton et de la découverte des lois de la pesanteur. De même, certains mouvements inexpliqués d’Uranus firent penser qu’il devait y avoir dans le système solaire une planète encore ignorée d’où la découverte de Neptune par Le Verrier.

À l’observation simple et directe s’ajoute, surtout dans les laboratoires, l’expérimentation, c’est-à-dire l’observation de phénomènes produits par des expériences volontaires.

On peut d’ailleurs faire aussi des expériences commerciales et sociales. Mais c’est toujours l’observation méthodique qui, seule, permet de formuler des conclusions et des lois.

À l’origine de presque toutes les grandes découvertes industrielles, il y a ce fait : un bon observateur a vu et compris une chose qu’avant lui des milliers d’hommes avaient eue sous les yeux sans la comprendre et même sans la remarquer.

C’est ainsi que l’observation de rayons irisés dans un amas de détritus, à la porte d’une raffinerie de pétrole, suggéra la possibilité de fabriquer des teintures et divers autres produits avec le goudron de houille.

Vous connaissez l’histoire de Denis Papin qui remarqua, en observant une marmite placée sur le feu, que la vapeur soulevait le couvercle malgré les efforts qu’il faisait pour le maintenir en place. Il découvrit en partant de ce fait le principe de la machine à vapeur.

C’est en observant que l’intensité d’un courant électrique est diminuée, pour une force électromotrice donnée, par l’introduction dans le circuit d’une bobine de fil de maillechort (alliage de cuivre, de zinc et de nickel) que l’on découvrit le rhéostat, ce qui rendit possible la traction électrique.

Avant cette découverte et ses applications, on ne pouvait employer l’électricité comme force motrice, car il n’y avait pas moyen de distribuer à volonté l’intensité du courant qui actionne le train électrique.

Son importance artistique.

6. Léopard De Vinci, dans son traité sur la peinture, enseignait que, pour acquérir la notion exacte de la forme des choses, on doit commencer par en étudier les différentes parties et ne pas s’occuper du deuxième avant d’avoir bien étudié et pratiqué la première ; autrement, on perdrait son temps ». Léonard avait noté, par exemple, que le cartilage formant l’arête du nez peut présenter huit formes différentes.

Le célèbre peintre Whistler exerçait, lui aussi, avec le plus grand soin, ses facultés d’observation. « je n’oublierai jamais, dit un de ses biographes, la leçon qu’un soir il me donna. Nous avions quitté son atelier à la brune et nous longions les jardins de l’hôpital de Chelsea.

Soudain, il s’arrêta et me montra dans le lointain un groupe de bâtiments et une vieille auberge dont les fenêtres jetaient des lueurs d’or à travers la brume vaporeuse du crépuscule. “Regardez !” dit-il. Comme il n’avait rien pour dessiner ou prendre des notes, je lui offris mon carnet. “Non, non, dit-il, laissez ça.” Après une longue pause, il s’éloigna de quelques pas ; puis, tournant le dos à ce qu’il venait de contempler, il me dit : “maintenant, voyons si j’ai bien appris.” comme il eût récité un poème appris par cœur, il me “récita” le paysage. Plus loin, un autre paysage, encore plus beau que le premier, s’offrit à nos yeux. Vainement j’essayai d’y attirer son attention “Non, non, dit-il, jamais deux à la fois.” Quelques jours après, je pus admirer dans son atelier notre premier paysage magistralement reproduit. »

Cette anecdote montre la faculté qu’avait Whistler de saisir un sujet dans son ensemble et d’en garder l’impression jusqu’à ce qu’il pût en fixer tous les détails sur la toile. Elle nous permet de mieux comprendre la vérité de ses œuvres et nous révèle jusqu’à un certain point le secret de leur charme.

Exercez-vous de même à voir en même temps les détails et l’ensemble.

Rembrandt n’avait acquis la même faculté qu’après bien des années d’efforts. Comme à vingt-quatre ans, il ne dessinait pas assez correctement de mémoire, il s’astreignit de patients exercices d’observation, toujours le crayon en main. De là ses nombreuses études de mendiants et de modèles.

Par cette contrainte, il parvint à se pénétrer si exactement des détails de tout ce qui passait devant ses yeux qu’on ne pouvait discerner s’il avait dessiné de mémoire ou d’après nature. Donc, ne vous rebutez pas si vos premières tentatives d’observation sont, sinon entièrement inexactes, du moins défectueuses. Prenez exemple sur ce maître et dites-vous que c’est en s’exerçant inlassablement qu’on devient un bon observateur.

Si les grands poètes du xix siècle, Lamartine, Vigny, Hugo, Théophile Gautier, ont eu de la nature un sentiment si vif, s’ils en ont si bien chanté les beautés, c’est qu’ils l’avaient minutieusement observée. Lisez attentivement cette page de Victor Hugo :

— Des ocres et des craies,

Plaines où les sillons croisent leurs mille raies,
Chaumes à fleur de terre et que masque un buisson,
Quelques meules de foin debout sur le gazon,
De vieux toits enfumant le paysage bistre,
Un fleuve qui n’est pas le Gange ou le Caystre,
Pauvre cours d’eau normand troublé de sels marins ;
À droite, vers le nord, de bizarres terrains
Pleins d’angles, qu’on dirait façonnés à la pelle,
Voilà les premiers plans ; une ancienne chapelle
Y mêle son aiguille, et ronge à ses côtés
Quelques ormes tordus, aux profils irrités,
Qui semblent, fatigués du zéphyr qui s’en joue,
Faire une remontrance au vent qui les secoue.
Une grosse charrette au coin de ma maison
Se rouille, et, devant moi, j’ai le vaste horizon
Dont la mer bleue emplit toutes les échancrures.
Des poules et des coqs, étalant leurs dorures,
Causent sous ma fenêtre, et les greniers des toits
Me jettent, par instants, des chansons en patois.
Dans mon allée habite un cordier patriarche,
Vieux qui fait bruyamment tourner sa roue et marche
À reculons, son chanvre autour des reins tordu…

(L’âme des fleurs. « contemplations »).

Formes, couleurs, bruits, attitudes, actions, le grand poète percevait tout parce qu’il observait tout.

Dîner, parce qu’il avait suivi le convoi d’une fourmi morte, avait assisté à l’enterrement, et était revenu avec la famille à la fourmilière mortuaire !

Son importance professionnelle.

7. Il n’y a pas de profession où vous puissiez exceller si vous n’avez pas des sens bien entraînés et l’habitude de l’observation. soutenue.

L’ingénieur et le médecin, voilà deux types d’hommes en apparence bien différents :

En réalité, ils ont en commun ce caractère essentiel : la capacité de pourvoir, au moyen de leurs connaissances, à des solutions souvent urgentes.

Ils doivent fournir à tout instant des directions pratiques ; il leur faut de promptes initiatives : les plus habiles sont ceux qui, ayant observé avec acuité des cas antérieurs, en trouvent une application spéciale dans le cas présent non moins profondément scrutée.

Pour réussir, il ne leur suffit pas d’appliquer automatiquement des formules toutes faites ; chaque cas diffère en quelque point des cas analogues ; c’est l’habitude qu’ils ont d’observer vite et bien qui leur fait découvrir les ressemblances et les différences, et adapter le traitement général connu au cas particulier accidentel et imprévu.

Comme le médecin, l’ingénieur a d’abord à préciser un diagnostic. Sa décision est affaire de compétence technique autant que de science. C’est le souvenir de ses observations passées qui le guide ; c’est encore l’observation qui lui fera constater s’il a vu juste et agi comme il le fallait.

Dans toutes les professions, le développement de l’acuité des sens dépend plus ou moins des connaissances techniques. Elles peuvent dicter un jugement immédiat dans le cas du drapier qui se fie à son toucher pour déterminer la substance et la qualité d’une étoffe, ou du marchand de vin dont le goût précise instantanément le cru et l’année d’un vin dégusté.

Il faut par contre infiniment plus de réflexion – à l’antiquaire, qui doit dépister mille truquages, tirer parti d’une foule de renseignements puisés dans l’histoire et les musées et, en outre, apprécier en artiste autant qu’en érudit.

L’habileté à discerner le faux et l’authentique n’est pas une dextérité qui dépende des sens seuls ; elle exige aussi la culture du jugement.

Il n’est pas de profession où cette sagacité ne trouve à s’exercer plus ou moins.

Même dans les tâches exclusivement manuelles, il y a une « légion de détails » où les surprises sont toujours possibles. Toute maîtresse de maison perspicace, qu’elle travaille par elle-même ou qu’elle commande à des serviteurs, connaît la valeur pécuniaire d’un œil exercé à discerner la qualité, et le prix véritables des choses.

Son importance dans les affaires.

8. L’éducation des sens a même une grande valeur pécuniaire. Avec des sens exercés, non seulement vous remarquerez plus de choses que la plupart des hommes, mais vous arriverez à posséder, des notions, des renseignements, des moyens d’une importance fondamentale dans les affaires.

Rien n’agace plus un chef que les erreurs et les ignorances de ses employés dues à un manque d’observation des détails. On envoie un apprenti porter un ordre à un contremaître. À son retour, son patron lui demande si les ouvriers ont passé la seconde couche de peinture.

Il n’en sait rien ; il n’a pas regardé. — « c’est un hanneton », pense le patron. Il penserait tout autrement si l’apprenti avait vivement répondu : « Oui, partout, sauf au rez-de-chaussée » Au lieu de rester commissionnaire, ce garçon monterait en grade.

Peut-être n’est-il pas plus sot qu’un autre, mais personne ne lui a dit qu’il faut être observateur, ni surtout appris à le devenir. Un comptable, un contremaître, bien mieux un ouvrier de n’importe quelle spécialité a sans cesse besoin de savoir observer ; et sans avoir aiguisé cette faculté, il lui est impossible de faire son chemin.

Parmi les qualités qui distinguent les chefs d’entreprise et les grands hommes d’affaires, le don, d’observation est l’une des plus nécessaires.

Il l’est même dans la vie courante, par exemple pour la femme qui fait ses emplettes.

Helleck raconte qu’une dame entra un jour dans un magasin pour acheter un col en dentelle. On n’y tenait que des articles bon marché ne lui convenant pas. Le commis s’aperçut bientôt qu’elle ne savait pas distinguer la dentelle faite à la main de celle qui est fabriquée à la machine.

Il continua donc à découvrir de nouveaux modèles dans son stock, et, chaque fois, il élevait les prix. Il remarqua que plus les cols étaient chers, plus ils plaisaient à la dame. Il lui en vendit enfin un, soi-disant en véritable Cluny, au prix de 80 francs, ce qui faisait à peu près 65 francs de plus qu’il ne lui avait demandé la première fois pour la même qualité de marchandise.

Voilà un cas où des connaissances précises, fondées sur une observation attentive des détails caractéristiques, auraient dévoilé la fraude.

Discernez les différences

9. Cette anecdote prouve qu’il est de première importance, dans la vie pratique, de savoir discerner les différences. Ceci est facile quand les objets se ressemblent peu, comme une pomme et une clef. Mais il faut être bon observateur pour trouver vite la différence entre deux objets d’apparence identique.

Cette finesse dans la « sensation de différence » se laisse développer par des exercices du type suivant.

Prenez deux grains de raisin de même grandeur et cherchez-y des différences, ensuite augmentez-en le nombre ; faites le même exercice avec d’autres objets, d’apparence identique, par exemple deux cailloux de même grandeur, deux épingles, deux cuillers à café ou deux assiettes prises dans le même service.

Profitez de chaque occasion où vous rencontrez des objets « identiques » pour vous exercer. Vous remarquerez au bout d’un certain temps, avec satisfaction, que votre capacité d’apercevoir les différences a augmenté sensiblement.

Vous acquérez ainsi peu à peu le don précieux de voir plusieurs choses là où les autres n’en voient qu’une seule.

« Faire la différence » est le point de départ du progrès de la connaissance et l’instrument essentiel de toutes les sciences d’analyse.

Pratiquement, cette méthode d’observation a de grands avantages ; elle permet, par exemple, de distinguer l’artificiel du naturel. Voici la description des caractères des vrais et des faux rubis que nous a donnée un expert en pierres précieuses.

Structure : la vraie pierre

Bulles : de formes irrégulières, souvent allongées, fréquemment angulaires.

Variations de la couleur : la couleur varie fréquemment suivant les différentes parties de la pierre : les bandes sont, soit parallèles, soit irrégulières.

Stries : parfaitement droites ou angulaires.

Matières étrangères : particules de dimensions variées disposées irrégulièrement.

Soie : caractérise tout à fait le rubis naturel ; est due à une série de minuscules canaux suivant trois directions définies, d’où la lumière est réfléchie, ce qui donne un reflet soyeux.

Structure : la pierre artificielle 

En général parfaitement rondes, rarement allongées, et jamais angulaires.

Couleur généralement uniforme, varie occasionnellement ; le tour des bandes est courbe.

Série de courbes concentriques.

Petites particules généralement disposées en courbes suivant les lignes striées.

Cette structure ne se trouve jamais dans les pierres artificielles.

À notre époque, où la fabrication des pierres artificielles est si florissante, il est utile de savoir que la manière la plus simple de les reconnaître, c’est de constater leur moindre transparence. Vous pouvez voir clairement et nettement au travers de la véritable pierre, mais non au travers de la fausse, car alors l’image est toujours plus ou moins voilée.

Une pierre précieuse naturelle montée, même portée pendant quelques heures, reste toujours froide : on peut s’en rendre compte en la mettant contre le lobe de l’oreille. La pierre artificielle, au contraire, s’échauffe dans la main.

L’observation a donc permis de discerner des « caractères différentiels ».

Comment interpréter ses observations.

-10. Nous l’avons déjà dit : observer avec exactitude n’est encore qu’un premier pas vers la connaissance ; le second consiste à interpréter ses observations.

La culture des sens implique une curiosité permanente et une culture préalable de l’esprit. Le monde extérieur ne vous révélera pas grand-chose si vous ne l’interrogez pas, c’est-à-dire si, n’ayant pas choisi un sujet qui vous intéresse, vous vous contentez de regarder, d’écouter n’importe quoi.

Ayez avant tout un sujet d’intérêt, ce que, dans la leçon ii, nous appelons un but. Ce but agira comme un aimant sur les sensations que vous recevrez des choses : celles qui ont trait à votre préoccupation dominante viendront irrésistiblement à vous, seront retenues et assimilées ; elles vous serviront à comprendre les autres sensations de même ordre, par analogie ou par contraste.

Sans doute, bien observer, c’est observer beaucoup de détails.

Mais vous risquez de vous y perdre si vous n’avez pas une idée directrice qui puisse vous servir à les débrouiller, à les classer et à les grouper.

Parmi les données de vos sens, les unes doivent être isolées, les autres associées. Il faut, pour cela, les comparer entre elles et les rapprocher de ce que vous savez déjà.

Les leçons prochaines vous feront comprendre l’importance capitale de la méthode dans tout effort de l’esprit.

Voici dès maintenant quelques cas typiques qui illustrent la nécessité d’une méthode rigoureuse d’interprétation dans certaines circonstances.

Le major Corbett Smith, dans son livre La Marne et Après, raconte que « plusieurs soldats et un caporal, tous observateurs exercés, furent chargés d’aller reconnaître une ferme. Les derrières du bâtiment confinaient à un petit bois.» de hêtres, il n’y a pas de sous-bois. Ils partirent pourtant, mais en se dissimulant de leur mieux.

“Comme ils approchaient des arbres, en silence, un couple de ramiers s’envola soudain. Ils comprirent que quelqu’un dans le bois avait dû déranger ces oiseaux. Ce ne pouvait être que des ennemis, puisqu’il n’y avait qu’eux dans les environs.

La patrouille rampa toujours silencieusement jusqu’à l’entrée de la ferme, y pénétra et surprit quatre soldats allemands dans la cuisine du fond. Un cinquième, sous les hêtres, ramassait du bois. Si le caporal n’avait pas connu familièrement les hêtres, si ses hommes n’avaient pas remarqué et interprété chacun à part lui la fuite des ramiers, leur petite expédition n’aurait peut-être pas aussi bien réussi.”

Le travail du détective.

11. Prenez une paire de vieilles chaussures. regardez-les bien. pourriez-vous dire, avec quelque chance d’exactitude, à quelle sorte d’homme elles ont appartenu ?

Non, probablement. Cette question fut posée à un médecin qui pratiquait volontiers les méthodes de déduction chères à Sherlock Holmes. Il répondit :
“l’homme qui a porté ces souliers est très grand. Aucun homme de petite taille ne pourrait marcher couramment avec des souliers de cette dimension ! —
Il marche à longues enjambées. J’en suis sûr… voyez comme ses talons sont éculés.

Vous avez certainement remarqué que, si vous faites de grands pas, vos talons, touchant le sol avant la semelle, s’usent très vite.

Notre homme a des rhumatismes. C’est sa sueur qui a pourri le cuir à l’intérieur.

Il passe une grande partie de son temps en plein air. À la marque en creux que je vois sous la semelle ; je reconnais qu’il use souvent d’un marchepied. il pourrait bien être conducteur d’omnibus.

Quelle que soit sa position sociale, il ne s’occupe guère de sa toilette, et ce n’est pas un homme de sport, puisqu’il marche en dedans.”

On remit ces mêmes souliers à, un détective qui fit ce rapport : “l’homme est grand (environ 1 m. 80), il est solidement bâti. — à en juger par la manière dont ses souliers sont usés au milieu, il doit peser à peu près 89 kilos. — ce n’est pas un ouvrier. — il ne soigne pas ses chaussures, et pour les porter aussi éculées, il devait, en ce temps-là,

‘ tirer le diable par la queue’.

Il a des ‘ pieds de canard.’

En réalité, ces chaussures appartenaient à un reporter d’un journal populaire, — homme de haute taille (1 m. 85), — marchant à grands pas, – grimpant à l’autobus plus souvent qu’à son tour, massif, ne pratiquant aucun sport, peu soigneux dans sa mise.

Systèmes d’identification.

12. Les annales de la police judiciaire sont pleines d’anecdotes qui prouvent à quel point l’observation méthodique tend peu à peu à la science proprement dite. En voici quelques-unes à titre d’indication.

Souvent, pour esquiver un interrogatoire serré, les inculpés font semblant d’être sourds. — En voici un qui ne sourcille même pas quand on fait tomber derrière lui, un poids de dix kilos. Cet excès d’insensibilité le trahit ; il est poussé trop loin. Averti par l’ébranlement de l’air, du plancher et des parois de la salle, un vrai sourd se serait retourné instinctivement.

Une maison de campagne avait été cambriolée. Pour dépister la police, les voleurs avaient fait de fausses empreintes sur la terre humide d’une corbeille de fleurs. On y voyait les traces de la marche de quatre personnes, dont une femme. Les détectives s’aperçurent vite que les empreintes des chaussures de femme étaient truquées : le voleur qui avait mis des souliers de femme avait fait des pas d’homme !

Un voleur se défendait d’avoir dérobé de la farine dans un moulin. La semelle de ses chaussures le trahit : elle était recouverte de deux couches de boue entre lesquelles se trouvait un peu de farine.

Certes, il n’est pas nécessaire d’appliquer à vos affaires, à votre profession, à tout ce qui vous intéresse, une méthode aussi rigoureuse que celle de la police. Mais les petites découvertes que vous aurez faites chemin faisant, vous les aimerez parce qu’elles seront vôtres, vous prendrez confiance en vous-même, et vous saurez bien ce que vous avez appris de la sorte.

Apprenez à observer vite et bien

13. L’exercice rend l’exécution d’une fonction de plus en plus facile, rapide et de moins en moins consciente. C’est la une loi générale de l’habitude. Il en est de même pour l’Observation : on observe, au début avec effort, avec beaucoup d’attention et lentement, mais on finit par observer sans s’en rendre compte et d’une façon instantanée.

Donc, ne soyez pas découragé par la lenteur de votre apprentissage d’observateur ; n’oubliez pas que pour apprendre à lire, vous avez dû d’abord observer chaque lettre, mais que maintenant vous le faites à votre insu.

Il s’agit avant tout de développer votre capacité d’observation. C’est comme dans les exercices de gymnastique : le mouvement lui-même n’a aucune valeur pratique ; car on ne produit rien en levant 10 fois le pied en l’air, ou en pliant son bras. Mais la fonction des muscles s’exerce et c’est ce qu’on demande à la gymnastique.

Ainsi doit être développée en vous la fonction mentale appelée observation.

Puis, vous devez apprendre à observer avec précision et avec rapidité. Il y a des choses qu’il faut considérer très attentivement pour être sûr qu’elles bougent ou restent immobiles, qu’elles changent de couleur ou non.

Il est parfois nécessaire d’examiner une étoffe de très près, de la manier même pour découvrir ses défauts. La justesse des appréciations dépend de la rigueur avec laquelle on perçoit les analogies et les différences, et cette rigueur est en raison directe de l’attention.

L’observation précise est le plus souvent le propre des esprits lents, pondérés. Elle exclut d’ordinaire la vitesse, qualité aussi précieuse que rare.

La compétence exceptionnelle de “l’expert” tient à ce qu’il concilie justesse et rapidité : son jugement n’est pas moins sûr que prompt. Tous les hommes ne sont pas appelés à devenir experts.

Mais tous les pelmanistes doivent y tendre et peuvent y prétendre. Animé, stimulé, soutenu par cette conviction, guidé par un enseignement qui est le fruit de la science et de l’expérience, vous aimerez, posséderez, dominerez votre métier et réaliserez sûrement la légitime ambition qui vous a amené au pelmanisme.

Vitesse, précision, ces deux qualités qui, théoriquement, semblent s’exclure, s’unissent dans la pratique, s’entraident, etc. Finissent par se fondre en une aptitude inestimable.

Admirable résultat de cette activité harmonieuse de toutes les énergies mentales qui est l’idée mère, le thème perpétuel, le but permanent du pelmanisme.

Nous ne nous lasserons pas de vous le répéter : c’est par une minutieuse analyse que vous connaîtrez les choses ; c’est par l’exercice que chacune de vos facultés, prise isolément acquerra toute la puissance dont elle est capable, mais ces connaissances et ces puissances resteront stériles si vous ne maintenez entre elles la concordance harmonieuse qu’elles ne peuvent réaliser que dans l’action.

III. La culture de la mémoire dans ses rapports avec

L’observation

Les sens et la mémoire.

1. Les exercices indiqués dans les leçons précédentes ont commencé la rééducation de votre attention et de votre mémoire. La présente leçon doit y contribuer d’une façon plus complète.

Vous disposerez de souvenirs précis, fidèles, promptement remémorés, si, par une observation attentive, vous avez recueilli des impressions vives et nettes. Tout progrès dans la perception est un enrichissement de votre mémoire et tout enrichissement de votre mémoire vous prépare à acquérir plus aisément des perceptions nouvelles complétant les anciennes.

De ce point de vue, la culture de la mémoire n’est qu’un aspect ou une application de la culture des sens.

Whistler et Hugo, contemplant la nature, gravaient dans leur souvenir des impressions vigoureuses. Même aux heures qu’il ne consacre pas à sa profession, l’expert “expertise” encore pour enrichir sa mémoire de souvenirs qui seront pour lui des suggestions, des éléments de comparaison et des critères.

L’observation précise a toujours sa valeur, soit pour l’action immédiate, soit pour l’action future, soit à la fois pour le présent et pour l’avenir.

Réciproquement — et c’est la preuve que les deux faits sont étroitement liés — la vivacité de la mémoire facilite la précision, la rapidité de l’observation. C’est elle qui permet de transformer instantanément une sensation vague en perception consciente.

C’est d’elle aussi que provient la présence d’esprit. Une dame laisse tomber dans son cabinet de toilette une bouteille d’essence de térébenthine qui se casse. au contact d’une allumette mal éteinte, l’essence s’enflamme ; une nappe de feu s’étend sur le plancher.

Le premier mouvement n’est-il pas d’y jeter le contenu du broc d’eau qui est là tout près ? Heureusement, la dame se souvient d’avoir lu qu’en pareil cas l’eau est inutile et même dangereuse et qu’il faut couvrir la flamme pour arrêter l’incendie. Elle court à sa chambre, prend une couverture, étouffe le feu. Sans la vivacité de sa mémoire, elle était en danger de mort.

Mémoire visuelle et mémoire auditive.

2. Au trésor de la mémoire chaque sens apporte sa contribution, ou plutôt, il y a autant de mémoires que de sens, et elles sont souvent de qualité très différente. les uns gardent et rappellent plus facilement les impressions visuelles, d’autres les impressions auditives.

Cultivez celle de vos mémoires qui laisse le plus à désirer ; réprimez la tendance paresseuse à vous en remettre, uniquement. à la meilleure ; ne vous servez de celle-ci que pour fortifier les autres.

Vous cherchez, par exemple, un mot que vous avez lu et entendu. Après une longue réflexion, votre mémoire visuelle se met à fonctionner : vous vous souvenez que c’est dans un journal que vous avez lu ce mot, en première page, — dernière colonne, — dans un article de X…., — et le mot vous apparaît !

C’est donc que votre mémoire des yeux est meilleure que celle des oreilles ; hâtez-vous de fortifier cette dernière ; recherchez pour vos oreilles des impressions fortes et répétées. Articulez plusieurs fois, soit de bouche, soit mentalement, le mot que vous venez de retrouver et, désormais, faites de même pour tous les mots et même pour les phrases, citations, poésies, que vous aurez plaisir ou intérêt â retenir.

Supposons, au contraire, que ce soit votre mémoire auditive qui réponde. Ce mot que vous cherchez, vous vous souvenez de l’avoir entendu en promenade, un dimanche, de la bouche de votre ami Y… Aussitôt que vous l’avez retrouvé, écrivez-le plusieurs fois. Vous ne l’oublierez plus.

Pour la même raison, les figures qui agrémentent les réclames d’un produit restent toujours associées dans votre esprit au nom du fabricant. Vous avez l’habitude de les voir ensemble ; on les a si souvent présentés à votre esprit comme des images connexes qu’ils se sont fondus en une seule image, et que l’aspect de l’un rappelle immédiatement l’aspect de l’autre.

Vous vous remémorez facilement les noms fameux que vous lisez dans tous les journaux, parce que des impressions visuelles répétées viennent à votre aide. Vous oubliez rarement les noms de vos correspondants, parce que vous êtes familiers avec l’apparence visuelle de leurs noms écrits et qu’elle s’est fondue peu à peu avec le souvenir de leurs personnes.

Par contre, vous oubliez facilement les noms que vous n’avez jamais vus écrits ou imprimés, ceux des personnes qu’on vient de vous présenter ou que vous avez rencontrées par hasard, parce que leur nom n’a été pour vous qu’un son comme un autre, sans association aucune avec une image visuelle définie…

Son et orthographe.

3. Pour établir un rapport étroit entre la mémoire visuelle d’un visage et la mémoire auditive d’un nom, afin que l’une puisse aider l’autre, vous devrez concentrer spécialement votre attention sur la forme écrite ou typographique de ce nom lorsque vous l’entendrez. Demandez-en l’orthographe si vous l’ignorez.

Vous devrez aussi le prononcer à haute voix en faisant très attention aux lettres qui le composent et à toute singularité qui le caractérise. Ne vous contentez pas de dire : « monsieur machin, monsieur chose ». Essayez, lorsque vous rencontrez les gens pour la première fois, d’obtenir pendant quelque temps une impression aussi vive des noms que des visages, afin de combiner l’impression visuelle et l’impression auditive.

Quand vous pensez à quelqu’un, ne manquez jamais de vous rappeler son nom et de l’épeler mentalement. Lorsque vous rencontrez une personne de votre connaissance, remémorez-vous toujours son nom, même s’il vous est inutile sur le moment, et tâchez de le voir écrit en pensée, ou de l’épeler. Vous éviterez ainsi cet affaiblissement de la mémoire des noms propres qui se manifeste assez souvent aux environs de la cinquantaine.

le trait pittoresque ou caractéristique.

4. L’acuité de l’observation contribue encore à la précision du souvenir en accrochant la mémoire à des points en relief. ce que vous avez remarqué avec attention, ce dans quoi vous avez perçu des détails originaux, se grave profondément dans votre souvenir. Non moins que l’artiste ou le savant, l’homme d’affaires doit épier le caractère concret, singulier, qui fixe la mémoire. « ma mémoire des noms et des figures m’a bien servi », nous raconte un grand commerçant parisien. « Il y a deux ans, étant à Lyon, je fus présenté à M. Richard. Je ne le vis qu’une minute.

Hier matin, il ouvrit la porte de mon bureau et je le reconnus à l’instant. « bonjour, monsieur richard, lui dis-je, comment allez-vous et comment vont tous nos amis de Lyon ? »

Il ne put cacher sa surprise. Peut-être avait-il cru qu’il faudrait me rappeler notre première entrevue ; aussi fut-il enchanté de n’avoir pas à prendre cette peine, et je suis sûr qu’il m’acheta plus de marchandises que si je n’avais pu me souvenir de lui, ou — ce qui eût été pire — si j’avais prétendu à faux le reconnaître et commis quelque impair.

Ah ! oui, je puis vous l’assurer, la mémoire est un fameux atout en affaires ! je ne me contente pas d’une impression d’ensemble. Je cherche toujours un trait caractéristique.

Richard a les yeux ardents et porte sur le nez une marque bleue. — « vous avez dû vous exercer longuement pour arriver à de tels résultats ? » — « C’est vrai, mais je ne regrette pas ma peine ; à présent je n’oublie jamais une figure, une fois que je l’ai réellement vue, c’est-à-dire regardée avec attention.’ » Le plaisir que fait éprouver le pittoresque favorise la mémoire.

C’est pourquoi la réclame cherche pour les noms et les titres des caractères et des dispositions qui frappent les yeux. Elle cherche aussi des mots capables d’intéresser l’oreille par leur sonorité agréable ou bizarre.

PAS DE DÉFAILLANCES

La publicité est bien faite quand elle sait obtenir le concours de tous les sens pour imposer à la mémoire le nom d’un produit ; elle est parfaite quand elle arrive en outre à piquer la curiosité et à éveiller les désirs et, les espérances qui sont dans tous les cœurs humains. Tel produit, comme l’eau de jouvence, doit en partie son immense succès au nom génial qui a été trouvé pour lui.

04 La volonté et l’effort
02 Avez-vous un but ?
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